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1 avril 2011 5 01 /04 /avril /2011 00:58

 

 

RAOUL LaZoR par sergeDEFT.

 

Quelque part à Oléron.

NE VOUS FIEZ PAS AUX APPARENCES ! (Ne vous fiez JAMAIS aux apparences !). Avec son allure « d’homme des bois » et son air peu avenant, Raoul LaZoR, semble être né ici, au milieu des marais. On serait tenté de dire au milieu du bayou. Eh bien, raté ! Celui qui vit entouré de chiens et grommelle au cul des chevaux au milieu de nulle part a très longtemps usé ses semelles dans les grandes villes et traîne la nostalgie des rues mal éclairées et des virées alcoolisées de bar en bar jusqu’aux premières lueurs de l’aube.

Ca sent le CV chargé même s'il ne parle que très rarement de son passé. Faut dire que l’homme n’est pas très causant. C’est le moins qu’on puisse dire.

Raoul LaZoR a décidé de fuir un jour toute la crasse et la folie urbaines, de partir vieillir à l’abri des regards derrière de hautes herbes, loin du monde extérieur, avec pour seuls compagnons des clébards et des canassons presque aussi cabochards que lui. Ne quittant plus l’endroit que de temps en temps pour aller acheter du tabac 

                                            mais gardant toujours son antique guitare électrique à portée de main, même les premières années, lorsque sa cahute en planches raboteuses et tôles ondulées de récupération n’était pas encore reliée au réseau.

Les hivers ont dû lui paraître parfois longs sans la douce chaleur des amplis à lampes…  

Vol lent de héron cendré au-dessus des prairies humides donc, pour le quotidien de Raoul LaZoR et soleil rougeoyant le soir à l’horizon entre les grands troncs maigrelets des pins et le feuillage des chênes verts tortueux.

Avec un tel environnement, on aurait pu s’attendre à ce qu’il compose tranquillement en solitaire, et avec une vraie guitare en joli bois (celle sans trou pour le jack), des chansons bonne conscience pour feu de camp, de celles qu’on reprend en chœur et qui plaisent aux jeunes filles et aux puceaux attardés qui les accompagnent. Le genre bucolique quoi ! Avec de belles paroles dans l’air du temps en cette période de grand réchauffement et de catastrophe planétaire annoncée. Qu’il nous écrive par générosité et grandeur d’âme, rêveur souriant, des ballades primesautières au petit matin, avec des notes égrenées et aériennes – de la putain d’authentique pureté acoustique - ultra mélodiques, de la musique frivole, soporifique, irritante… INSUPPORTABLE !

Et s’il avait décidé de les enregistrer, le canapé défoncé, sous l’auvent de canisse devant la cabane en bois, aurait fait le décor parfait pour la photo de la pochette en papier recyclé, un peu rugueux sous les doigts. Il n’aurait eu qu’à s’affaler sur les coussins élimés, un chien à ses pieds.

C’était ignorer le goût immodéré de cet homme au sang chaud pour les guitares qu’on branche et qu’on brandit.

Donc (respirez bien fort et lisez d’une traite), malgré un paysage alentour particulièrement reposant, on l’a vu, qui ne prédispose pourtant en rien, vous en conviendrez, à faire de la musique très électrique en recourant aux sons les plus tordus dans le seul but de titiller le clampin pressé en général de s’ennuyer, mais incite plutôt à continuer à se la couler douce - pas d’panique camarade, y a encore du papier à rouler - le pouls toujours au ralenti, remettant encore une fois à demain les trois clous à planter pour réparer l’enclos des chevaux, Raoul LaZoR s’est installé devant une glace et s’est longuement regardé dedans (parce que c’est pas aussi contraignant et moins coûteux que d’aller chez un psy) et là, il a vu dans ses yeux cette fièvre tenace qui le pousse depuis toujours à se colleter à ses congénères et a alors décidé de réunir autour de lui quelques âmes indomptables pour jouer un rock dévoyé, faire du binaire grinçant, meurtrir les instruments, branler les machines, devenir avec ses acolytes de redoutables pourvoyeurs de saleté sonore, retrouver l’énergie originelle et sa violence roide, renouer avec ce que cette musique aurait dû toujours être et célébrer au passage ses héros, ces dézingués complets, ces fous furieux, érotomanes avancés, ces mordus de vitesse, gobeurs de pilules et buveurs invétérés.

Raoul LaZoR devant sa glace a envoyé alors un généreux et magnifique bras d’honneur au reste du monde, en se fixant comme seule morale celle de la marge.

Amen.

sergeDEFT - Mars 2011.

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